Selon Sylvain Grisot, urbaniste et fondateur de dixit.net (agence de conseil et de recherche urbaine) : “Nos villes sont menacées d’obsolescence climatique par la multiplication des les étés qui tuent. L’effet d’îlot de chaleur urbain y est particulièrement intense, avec des conséquences désastreuses”.
Rues minérales, revêtements sombres, climatisations, absence de végétal, d’eau, d’ombre et de circulation de l’air dans des rues étroites… tous ces facteurs s’accumulent pour créer des écarts de température qui peuvent aller jusqu’à 8 à 10 °C entre le centre-ville et les zones rurales alentour. Le phénomène est critique dans une ville comme Paris qui cumule les handicaps d’une ville dense et minérale. Séniors, jeunes enfants, personnes à la santé fragile ou isolées, sans domicile fixe, travailleurs exposés… La liste des victimes potentielles est longue. Il faut y ajouter la faune et la flore urbaine éprouvée par la sécheresse, ainsi que les infrastructures de nos villes, pensée pour un autre climat.
Alors, si les villes doivent faire leur part dans les efforts d’atténuation du réchauffement climatique, c’est bien d’adaptation qu’il s’agit ici. Car les infrastructures techniques ne suffiront pas à passer le siècle, nous devons nous appuyer sur le vivant pour maintenir l’habitabilité de nos villes. Il nous faut faire de la place, briser le bitume, régénérer les sols, rétablir leur perméabilité à l’eau, et renaturer. Pas des démonstrateurs plantés devant les mairies pour briller sur les réseaux sociaux, mais une transformation en profondeur des espaces publics du quotidien, en requestionnant systématiquement l’usage de chaque mètre carré imperméabilisé. Et il y a urgence, puisque la durée de vie d’un aménagement urbain est d’une trentaine d’années, nous construisons aujourd’hui les rues de 2050. Chaque chantier d’entretien doit donc désormais être l’occasion d’une vraie métamorphose.
À Paris en tout cas, il n’y a pas que les grandes places et les avenues légendaires qui se transforment. Les rues du quotidien changent aussi progressivement de visage et d’usage. Des consultations sont organisées dans chaque quartier pour permettre aux habitantes et aux habitants de proposer des transformations de leurs espaces publics. Création de rues aux écoles, développement de pistes cyclables secondaires, plantations d’arbres, mise en valeur du patrimoine… Les propositions sont sélectionnées par les techniciens et les élus d’arrondissement, et mises en cohérence dans un programme de microtransformations des espaces publics du quotidien. L’enjeu est aujourd’hui d’accélérer le mouvement. Grands et petits projets ont initié en quelques années une métamorphose de la ville qui ne laisse pas indifférent, mais on est encore loin du compte. Les coups de chaud se multiplient et les Parisiens et les Parisiennes ne disposent pas assez d’espaces végétalisés de proximité. Il faut aller plus vite.
Ressources :
✉️ Lire la newsletter n°143 sur dixit.net
?️ Entretien à Florent Giry, Adjoint au Maire de Paris Centre en charge de la voirie, des mobilités et de la gestion des chantiers, qui explique comment la démarche est mise en œuvre, et en quoi elle pourrait inspirer d’autres collectivités.