À Brazzaville, Mpila est en plein renouvellement urbain

Ici, il y a du neuf : logements, centre commercial, collège-lycée, mairie, musée… Douze ans après avoir été ravagé par l’explosion d’un dépôt de munitions, l’emblématique quartier de Brazzaville renaît de ses cendres. Un chantier urbain hors norme.

Retour sur l’évènement tragique de 2012

Le dimanche 4 mars 2012, l’explosion d’un dépôt de munitions situé à proximité de la caserne du 1er régiment blindé soufflait le quartier de Mpila, situé à cheval sur les arrondissement de Talangaï et de Ouenzé, dans le nord-est de Brazzaville. Un peu avant 8 heures, une première déflagration met le feu à un stock d’explosifs, entraînant une série de détonations qui vont se faire entendre jusqu’à la mi-journée.

En quelques instants, les baraquements militaires sont réduits en poussière, tout comme les bâtiments qui bordent la large avenue de l’Indépendance. Mpila n’est plus qu’un amas de tôle et de gravats avec, en son centre, « un cratère de plus de dix mètres de profondeurs qui fume encore », selon les rares témoins. La tragédie, qui prend la population au saut du lit, fait des centaines de morts, plusieurs milliers de blessés et près de 20 000 sans-abris.

Douze ans plus tard, quelques milliers d’entre eux ont été relogés dans les nouveaux lotissements construits à Kintélé, à une vingtaine de kilomètres au nord de la capitale congolaise. Les autres ont utilisé les 3 millions de F CFA (4 570 euros) de « l’indemnité d’urgence » accordée par l’État à chacun des sinistrés pour rafistoler leur logement, à l’ombre des tours jumelles qui, au loin, du haut de leurs 136 mètres, dominent désormais le fleuve Congo, comme un symbole du renouveau en marche de ce quartier martyr. Car Mpila est en effet en train de renaître de ses cendres, avec l’aide des pouvoirs publics congolais et de leurs principaux partenaires financiers.

Un quartier entièrement repensé

Engagé dans un vaste programme d’aménagement du territoire national, l’État congolais réfléchissait depuis 2010 à la réhabilitation de ce quartier au passé industriel, qui s’est étendu de manière anarchique au fil des décennies.

“La catastrophe a poussé le gouvernement à entrer en action pour repenser totalement cette zone et en faire le trait d’union entre le centre historique de Brazzaville et les nouveaux développements en cours à Kintélé”,

Oscar Otoka, délégué général au ministère des Grands travaux, véritable maître d’ouvrage de cet énorme chantier urbain.

L’investissement est proportionnel, estimé entre 700 et 800 milliards de F CFA (entre 1 milliard et 1,2 milliard euros), pour réaliser les nombreux ouvrages à caractère commercial et résidentiel, mais aussi administratif, culturel et éducatif, prévus dans le nouveau plan directeur du quartier. Pour tourner définitivement la page de la tragédie du 4 mars, les casernes ont été déménagées et relocalisées en périphérie de la capitale, pendant que l’épicentre de l’explosion a été déminé avec l’aide des équipes des Nations unies. À la place sont sortis de terre la mairie du 6e arrondissement et un vaste bâtiment anguleux, qui accueillera bientôt le musée national de l’art et de la culture. Un peu plus loin, rue des Bangangoulous, se dresse à nouveau le lycée-collège de la Révolution, entièrement détruit en 2012.

Entre les deux ensembles, la première phase du Brazza Mall (appelé à s’étendre sur 37 000 m2) a été inaugurée le 20 décembre 2023. Tout autour, des rangées d’immeubles d’habitation ont émergé le long des grandes artères. Regroupés en quatre résidences, un peu plus de 1 200 appartements doivent être mis en vente, davantage pour répondre à un marché de l’immobilier sous tension à Brazzaville que pour reloger les anciens habitants. Pour ces derniers, un premier projet de 48 villas est en cours de réalisation et d’autres sont prévus « pour les victimes encore propriétaires qui acceptent de céder leur terrain en échange d’un logement », explique-t-on au ministère des Grands travaux.

Le Brazza Mall, une locomotive

Les pouvoirs publics ont déjà dépensé plus de 300 milliards de F CFA depuis le début des travaux de reconstruction et de modernisation de Mpila, en 2015, pris sur l’enveloppe accordée par la Chine dans le cadre des accords de partenariat stratégique signés avec le Congo.

« Elle a pour mission d’assurer le développement et la valorisation de ces infrastructures, ainsi que la commercialisation des programmes immobiliers, afin de faire de Mpila un pôle d’activités et de croissance pour le pays »,

Bernard Ngazo, Président du conseil d’administration de la Sedic.

La gestion commerciale de ces équipements destinés à entraîner l’économie du pays a été confiée à la Société d’exploitation et de développement des infrastructures du Congo (Sedic). Créée tout exprès en 2022, cette société anonyme de droit privé détenue à 100 % par l’État est placée sous la tutelle du ministère de l’Aménagement du territoire, des Infrastructures et de l’Entretien routier.

Pour attirer les investisseurs privés, un cadre fiscal avantageux a été accordé par l’État, qui est en droit d’attendre en retour d’importants bénéfices chaque année, grâce à une gestion optimale du programme. Les responsables de la Sedic ne ménagent donc pas leur peine pour assurer le succès de ces infrastructures, à commencer par celles du Brazza Mall.

« Ce nouveau mall sert de locomotive à l’ensemble du projet »,

Bénédicte Myriam Denguet-Atticky, Directrice générale de la Sedic.

Livrée en 2023, sa première phase, de 18 000 m2, est commercialisée depuis décembre dernier. Elle doit être complétée par une seconde phase d’une surface commerciale équivalente, qui doit être livrée d’ici à 2026. « Notre priorité actuelle est de remplir les modules existants », précise la directrice de la Sedic, qui espère un taux d’occupation de 70 % d’ici à la fin de 2024.

Des appartements en étage : une petite révolution

D’une superficie de 100 m2 à 150 m2, ces logements de « trois à quatre chambres » coûtent entre 57 millions et 100 millions de F CFA (entre 132 000 et 152 000 euros). Ils sont destinés à une clientèle ciblée de fonctionnaires et de jeunes cadres du pays, mais aussi de la diaspora. Pour convaincre ces primo-accédants, Armand Mabanza peut compter sur le soutien de l’État, qui propose des aides financières importantes, pouvant réduire « jusqu’à hauteur de 35 % les prix de vente, y compris, entre autres, les frais de notaire », précise le patron d’Icazi.

Selon Armand Mabanza, ces immeubles de quatre étages sont destinés à apporter « un nouveau cadre de vie dans une ville destinée à prendre de la hauteur pour ne pas continuer à s’étendre », mais ils souffrent néanmoins de leur verticalité puisqu’ils n’ont pas été équipés d’ascenseurs… Résultat, si les appartements en rez-de-chaussée et au premier étage sont quasi tous vendus, les niveaux supérieurs cherchent encore souvent preneur.

👀 Lire l’intégralité de l’article dans Jeune Afrique : https://www.jeuneafrique.com/1585086/economie-entreprises/a-brazzaville-mpila-est-en-plein-renouvellement-urbain/

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