Selon Sylvain Grisot, urbaniste et fondateur de dixit.net (agence de conseil et de recherche urbaine) : “Au moins 80 % de la ville de 2050 est dĂ©jĂ lĂ . L’enjeu principal rĂ©side donc dans le parc existant. L’équation ne tiendra que si la rĂ©novation du bâti monte enfin en puissance et qu’elle se focalise sur des rĂ©novations globales permettant Ă la fois de dĂ©carboner et d’adapter les bâtiments au climat qui change”.
Le secteur de la construction neuve a plutôt bien avancé dans la voie de la réduction de son empreinte carbone, mais cela ne suffira pas. Compter sur les indéniables progrès de la filière pour produire des bâtiments sobres, c’est se tromper d’objectif. Il va falloir mobiliser des centaines de milliers de femmes et d’hommes pour engager le chantier de la rénovation du bâti existant, en parallèle de la réduction du volume de production neuve. Car entre la baisse des besoins liés à la transition démographique et la nécessité de limiter les émissions et d’épargner les ressources, la décrue doit logiquement s’amorcer.
« Si toutes les personnes en lien avec le monde du bâtiment lisaient la Stratégie Nationale Bas Carbone, elles verraient noir sur blanc que 2050, c’est 40 % de construction en moins. Je ne sais pas si toutes ont bien en tête qu’il faut construire moins et que c’est l’État qui l’écrit ».
Guillaume Meunier, Consultant Bas Carbone à l’Institut Français pour la Performance du Bâtiment
Adapter notre patrimoine au climat qui change, éviter de construire en l’utilisant mieux, éviter de déconstruire en transformant ce qui peut l’être, faire durer ce qui est là , et construire moins pour plus longtemps en misant sur la réversibilité. Voilà les pistes à suivre. C’est donc au moment où se décide le lancement d’un projet et se précise son programme que les décisions cruciales se prennent. C’est un instant fugace à l’échelle de la vie future du bâtiment, mais où les décisions prises sont celles qui ont le plus d’impacts sur les budgets, la consommation de sols, la mobilisation de ressources ou les émissions de CO2.
Nous répondons au mieux aux besoins alors qu’il nous faut les réduire. Nous construisons alors qu’il nous faut faire durer. Nous comptons encore en euros alors que nos unités devraient être la tonne de ressource, de CO2 et de déchets. Nous ne manquons pourtant pas d’outils réglementaires pour provoquer le changement de pratique, alors pourquoi attendre ? Peut-être parce que chacun ne regarde le bâtiment que sur la courte durée de son intervention. Nous devons aligner notre regard sur son cycle de vie, pour sortir de la « tragédie de l’horizon ».
Le premier des changements sera donc culturel. « Construire » est aujourd’hui synonyme de construction d’un bâtiment neuf. Demain, mais pas après-demain, cela consistera à offrir une seconde vie à un bâtiment existant.
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